Pratique diffuse
Ressentir le miracle de la matière
C’est d’abord une question de silence intérieur.
Accepter d’arrêter ma mécanique mentale pour me rendre capable de recevoir de précieuses informations.
Celles-ci sont délivrées par les interactions de mon corps avec la matière.
C’est grâce au silence de ma pensée que je deviens apte à pénétrer les mystères de la sensation.
Je change de rythme et mes mouvements deviennent juste un tout petit peu plus lents, pour que je puisse les accompagner avec toute ma conscience.
Là, maintenant, je peux frôler du doigt le bord de cette table.
Je sens l’angle arrondi et la texture fine du bois verni.
L’intensité sera différente selon que j’appuie plus ou moins fort du doigt ou selon la rugosité du matériau.
C’est l’attention à une sensation comme celle-ci qui me procure d’abord un sentiment d’étrangeté, parce que je ne sais pas ce que c’est qu’une sensation. Je peux juste la ressentir, l’explorer.
Puis vient un certain plaisir, celui de ressentir et seulement de ressentir. Une impression inexplicable de régénération et de paix me remplit. Par contraste, mon état antérieur se révèle tumultueux et désordonné.
Là, c’est une paix empreinte de curiosité qui m’invite à explorer plus avant.
Je deviens de plus en plus sensible à tous les points de contact de mon corps avec la matière qui m’environne.
Je sens le poids de mon corps sur le fauteuil, je sens la texture chaude du tissu du siège sous mes cuisses, je sens le pli de ma chaussette gauche entre deux de mes orteils, mes avant-bras glissant sur les accoudoirs lisses de mon fauteuil et ce titillement un peu brûlant sur la pulpe de mes doigts qui frappent légèrement le clavier.
Il y a cet inconfort dans mes reins à cause de ma position sur le siège, que je corrige délicatement pour trouver une assise équilibrée.
Je peux me lever, assister à toutes ces miraculeuses rencontres avec le sol sous mes pieds, accompagner la complexe descente de l’escalier avec ma main qui caresse sa rampe lisse avec le goût de la sécurité.
Je peux me lancer dans l’opération magique de la vaisselle, avec son eau si chaude, si intense à couler sur mes mains, le poids et la texture des assiettes dans leur ballet purificateur. La vaisselle devient un acte sacré, je me purifie en même temps que je nettoie.
Que dire de la préparation du repas, avec ce légume, lisse ou terreux, ferme ou tendre que je vais éplucher pour découvrir le secret qu’il cache sous la peau, en m’émerveillant de ses couleurs et de ses formes ?
Et je ne vous ai parlé que du toucher et à peine du regard.
Déployez aussi votre odorat, votre ouïe, sans oublier votre goût.
C’est une pratique de la joie dans les actes quotidiens, une pratique en laquelle votre cœur peut se déployer et rayonner d’amour sans condition.
C’est une manière de vous régénérer, de vous relier à la Terre-Mère et à votre incarnation.
Alors de temps en temps, dans votre journée, arrêtez-vous pour ressentir consciemment et devenez l’artisan de votre joie par votre corps.
Roland Perret
Énergéticien en art solaire